La propreté

la propreté de l'enfant
L’étape de la « propreté » : On enlève les couches ?

Grande question qui revient souvent : comment faire pour que mon enfant aille au toilette et soit « propre » ? Il refuse d’aller aux toilettes à 2 ans, est-ce normal ? A quel âge et comment « commencer la propreté » ? Autant de questions qui sont posées par les parents aux professionnels… professionnels qui tentent de les rassurer, en leur disant que leur enfant, dans tous les cas, finira par aller aux WC. Tôt ou tard l’enfant devient propre, car comme pour de nombreux apprentissages, il est programmé à l’être. Mais les normes et la pression sociales sur cet aspect du développement du tout petit sont fortes. Cela est dû en partie parce que la propreté de l’enfant conditionne son entrée à l’école. Or, la société a évolué et nous ne sommes plus à une époque où l’on « dresse » l’enfant à être propre. Aujourd’hui, nous l’accompagnons dans cet apprentissage et cette acquisition progressive. Cette nuance a des effets sur le comportement de l’enfant, son développement psychologique, et sur des éventuels blocages futurs. Allons creuser un peu ce sujet qui fait débat, entre ceux de la « vieille école » et les partisans des nouvelles approches plus respectueuses du rythme de l’enfant…

La « propreté », c’est quoi ?

Acceptée par le Petit Robert comme « le fait de contrôler ses fonctions naturelles », la propreté est avant tout un état et la qualité d’une personne propre. Les jeunes enfants sont donc « propres » puisque nous assurons leur hygiène corporelle dès leur naissance. Pourquoi parle-t-on de propreté alors ? L’enfant qui ne va pas aux toilettes serait « sale » ? Nous utilisons ce terme qui a été banalisé dans le jargon de la petite enfance, mais si on y réfléchi bien, parler d’un enfant « propre », ne veut pas dire grand-chose… un enfant qui porte des couches n’est pas « sale » ! Il n’a seulement pas acquis la maturité nécessaire suffisante pour percevoir les sensations liées à ses besoins d’uriner ou d’aller à la selle. Ce que nous appelons « propreté » correspond en fait à la période du développement de l’enfant ou ses sphincters fonctionnent normalement et où il est en capacité de les contrôler volontairement. C’est donc ce moment où l’enfant commence à aller sur le pot ou sur les toilettes, et qu’il apprend à ne plus faire dans ses couches. L’apprentissage se fait par étapes et peut demander beaucoup de temps, de patience et de la compréhension.

Quelle approche de la « propreté » ?

Longtemps considérée comme un apprentissage, et même un « dressage », les pratiques autour de ce sujet ont évolué. Auparavant, la propreté s’obtenait après un dressage précoce, intensif et rapide. En effet, les mères mettaient l’enfant sur son pot, jusqu’à attendre qu’il y vienne quelque chose. Cela débutait très tôt, à un an. C’est dans les années 1960 que le virage du dressage vers l’apprentissage s’amorce. La vision et les connaissances de l’enfant ont évolué dans ces années-là, ce qui a permis de considérer cette acquisition autrement. De plus en plus, nous parlons d’éducation bienveillante, respectueuse de l’enfant. Il est acteur de son développement et de ses acquisitions, et c’est dans ce sens-là que nous agissons à la micro-crèche.
Mais il existe bel et bien une pression sociale, scolaire, pression de la famille, notamment des grands parents qui nous assurent que : « avant on faisait comme ça… ». Nous pourrions leur répondre que : oui, mais avant, nous n’avions pas toutes ces connaissances sur le cerveau de l’enfant et sur les bienfaits de l’éducation bienveillante sur son développement et équilibre psychologique. Les parents sont parfois pressés, ou perdus dans tout ça. Alors, ils cherchent à conditionner l’enfant, pour accélérer le processus et être « dans les normes ». Et pourtant, comme pour tout apprentissage et nouvelles acquisitions, c’est par l’imitation des « grands », des adultes, que la propreté s’acquiert et non par un « conditionnement » ou « dressage ». Alors, qu’en est-il ? Quel est le bon moment pour débuter cet « apprentissage » de la propreté, de quelle manière s’y prendre ?

Nous parlons d’apprentissage, mais en fait, la propreté ne « s’enseigne » pas à proprement parler. Cela dépend de l’enfant. Il faut qu’il y soit prêt physiologiquement et, surtout, « psychologiquement ». Ce qu’il y a de mieux à faire ? Tout simplement, le soutenir et l’accompagner. Surtout, lui faire confiance et ne pas mettre de pression ! L’apprentissage de la propreté demande de la patience et de la persévérance, ainsi qu’une grande confiance en l’enfant !

La propreté dépend de la capacité de l’enfant à contrôler sa vessie et ses intestins. Ce n’est que vers l’âge de 2 ans environ qu’il peut reconnaître la sensation que ses organes sont « pleins ». Ensuite, il apprend à détecter le moment où il est sur le point d’uriner ou d’aller à la selle. Enfin, il se dirige vers son petit pot avant qu’il soit trop tard. Quelques signes permettent de voir s’il est réellement « prêt » pour débuter cet apprentissage avec votre accompagnement.

Comment savoir s’il est prêt ?

C’est en observant l’enfant que nous pourrons supposer qu’il est prêt à commencer ce long apprentissage. Voilà quelques points de repères pour y voir plus clair :

Des capacités motrices :

il monte et descend seul les escaliers en alternant les pieds d’une marche à une autre

il pédale sur les tricycles

il court et saute sur ses deux pieds et passe facilement d’un pied à un autre

Des capacités cognitives :

il comprend ce qu’est un pot (ou des WC) et à quoi cela sert

il enlève sa couche seul et la met dans la poubelle

il s’essuie les fesses avec du papier et le jette dans les WC

Des capacités langagières :

il dit « pipi », « caca », « pot » et pointe du doigt

Des capacités relationnelles :

il souhaite faire plaisir

il n’est pas en opposition et accepte de s’asseoir sur le pot ou les toilettes

Ce qu’il faut savoir également c’est que cet apprentissage est aussi culturel… des différences existent d’une culture à une autre, d’une famille à une autre. Les méthodes utilisées pour apprendre à l’enfant à devenir propre sont variables. La plupart des enfants des pays occidentaux contrôlent leur vessie et leurs intestins entre 24 mois et 48 mois. Les filles ont tendance à y parvenir un peu plus jeunes que les garçons (et oui, les filles, nous sommes précoces sur les garçons dans certains domaines !). Soyez patients, car, entre le moment ou l’enfant commence à aller sur le pot / les WC, commence à maitriser ses sphincter, et la propreté réelle, il peut se passer quelques mois. L’enfant ne gère pas tout ça en quelques jours !

Il est également intéressant de savoir que l’enfant commence par maitriser ses urines avant ses selles. Le contrôle de la vessie ne coïncide en effet pas toujours avec celui des intestins. D’autant que les selles, représentent pour l’enfant une partie de lui-même, et il est parfois plus difficile de les « laisser partir ». Au niveau psychologique il peut en effet y avoir des « blocages ». Le processus d’apprentissage est très hétérogène, et il n’y a pas d’âge précis pour le commencer, c’est quand vous sentez l’enfant « prêt », et que vous pensez que c’est le « bon » moment !

La place du psychologique et de l’affectif

Souvent, l’enfant est « prêt » physiologiquement, mais ne l’est pas encore au niveau affectif et psychologique. En effet, on estime qu’à 18 mois, le réflexe du contrôle sphinctérien est mature. Son corps serait donc en capacité de retenir et laisser partir urine et selles. Mais cela ne veut pas dire qu’il est prêt à débuter cet apprentissage ! La propreté coïncide en effet parfois avec la période d’opposition de l’enfant, entre deux et trois ans. Période pendant laquelle l’enfant teste et repousse les limites. Le refus d’aller aux toilettes, de faire sur le pot, etc., peut correspondre à un moyen de pression. L’enfant sait qu’il a le « pouvoir » à ce niveau-là, car il peut ou non répondre aux demandes parentales. L’affectif entre en jeu alors… le parent demande à l’enfant de « faire plaisir »… or il est important de se détacher de cette notion de « aller aux toilettes pour faire plaisir », car l’enfant peut en jouer. En outre, l’enfant ne devient pas propre pour faire plaisir, mais parce qu’il en a les capacités et qu’il grandit.

Par ailleurs, l’enfant peut refuser de grandir justement… en restant un peu le « bébé » de ses parents… les couches sont synonymes de ce côté « maternage ». En effet, un enfant qui ne porte plus de couches, n’a plus ces moments privilégiés sur le plan de change, le temps de changer les couches, se faire chouchouter. Alors parfois il veut rester ou redevenir ce bébé dont on prend soin. L’arrivée d’un petit frère ou petite sœur amène d’ailleurs souvent à une régression de l’enfant, qui peut se mettre à faire pipi dans sa culotte, vouloir encore des couches… cela correspond à un besoin d’être materné, d’attirer une attention particulière. Car il n’est plus le tout petit, celui que l’on cajole, avec qui on prend le temps. Il est nécessaire dans ce cas-là de pouvoir fournir de l’attention à l’enfant, partager d’autres moments… « Prendre soin », ce n’est pas seulement au niveau de la toilette, c’est de manière générale.

Comment accompagner l’enfant dans cette étape progressive vers la propreté ?

Lorsque ce sujet commence à vous questionner, vous pouvez déjà acheter un petit pot et le présenter à votre enfant. Cet objet n’aura pas beaucoup de sens au départ pour lui. Mais en lui expliquant son utilité, il finira par comprendre à quoi il sert. Il est préférable de lui laisser libre accès, afin qu’il puisse se familiariser avec. Au début, ne vous étonnez pas si le pot est un jeu pour l’enfant. Il va jouer avec, monter dessus habillé, le déplacer, etc. Tout comme tout nouvel objet, l’enfant a besoin de l’expérimenter afin d’en comprendre les caractéristiques et de comprendre son utilisation. Cela lui permet de se familiariser avec l’objet.

Puis quand vous observez qu’il peut être « prêt », vous pouvez lui proposer d’aller dessus pour faire ses besoins. Par exemple après les repas, avant la sieste… ritualiser ce moment c’est lui donner des repères. Il acceptera ou pas, mais au mois il sait qu’il pourra aller dessus a ces moments-là, et même quand l’envie se fera sentir. Parfois, l’initiative vient même de l’enfant qui, par imitation, voudra aller aux toilettes ou essayer le pot.

Lorsque l’enfant utilise le pot ou les WC régulièrement, et que sa couche est à chaque fois sèche, vous pouvez lui proposer de porter une culotte. Les accidents sont toutefois inévitables, et les parents doivent faire preuve de soutien et de patience. L’enfant qui vit une série d’accidents peu après avoir commencé à porter une culotte devrait pouvoir recommencer à porter une couche, sans honte et sans punition. C’est très dur pour lui d’être puni ou qu’un adulte se fâche lorsqu’il y a un « accident ». Toute nouvelle acquisition nécessite des « essais – erreurs », et plus une pression pèsera sur l’enfant, moins il y arrivera.

Certains enfants hésitent à déféquer dans le petit pot ou dans les toilettes, surtout s’ils n’ont pas un bon soutien pour les pieds. Il est essentiel lorsqu’un enfant n’a pas fait de selles depuis un moment, de lui permettre de porter une couche afin de prévenir la constipation, qui peut engendrer des blocages et retards dans l’apprentissage de la propreté.

L’idéal c’est de se laisser guider par l’enfant, et que la démarche vienne de lui ensuite. Vous pouvez lui proposer régulièrement, mais lui imposer n’est pas la bonne méthode. Pourquoi ? Parce que cela peut créer des blocages par la suite. Rien ne sert de mettre la pression à l’enfant. Plus vous serez préoccupé par cet apprentissage, plus l’enfant fera le contraire de ce que vous souhaitez. Et oui, les enjeux affectifs sont présents, surtout dans cette période de deux à trois ans, ou l’enfant repousse les limites de son environnement. Alors que plus vous serez « tranquille », mieux cela se passera. L’enfant sur qui on met de la pression / du chantage / que l’on gronde s’il ne fait pas au pot ou même puni… peut faire de cette acquisition un enjeu entre vous et lui. Lui seul maitrise ses sphincters et a la capacité de relâcher ou retenir son urine et ses selles, vous ne pouvez pas agir dessus ! Alors, faites lui confiance, encouragez le, félicitez le s’il va aux WC, mais ne vous fâchez pas s’il y a des « loupés » ou un refus d’y aller. L’initiative et la réussite ne peuvent venir que de lui. En tant qu’adultes, nous ne sommes que les accompagnateurs de cette démarche et de cette acquisition.

À la micro-crèche, nous suivons ce que vous commencez à la maison. Si vous nous transmettrez qu’il va sur le pot à la maison, nous lui proposerons également. Parfois, nous observons l’inverse. L’enfant peut être intéressé par les toilettes ou le pot à la crèche, souvent par imitation de ceux qui y vont déjà. Dans ces cas-là, nous nous laissons guider par l’enfant et nous vous le transmettons. L’important c’est de créer une cohérence et du dialogue autour de cette acquisition, afin d’aller dans une démarche cohérente et bienveillante pour l’enfant. Alors n’hésitez pas à nous solliciter si vous avez des questions, ou pour en discuter. Le dialogue et la communication sont la clé pour accompagner au mieux votre enfant, dans la propreté comme dans tous les autres domaines de son évolution.

Aurélie, éducatrice de jeunes enfants

Bibliographie
http://naitreetgrandir.com/fr/etape/1_3_ans/soins/fiche.aspx?doc=naitre-grandir-enfant-apprentissage-proprete-couche-petit-pot
http://www.cps.ca/fr/documents/position/apprentissage-de-la-proprete
• Journal des professionnels de la petite enfance, mai / juin 2015, n°94, p24
• L’ABébéC de la petite enfance, Laurence RAMEAU, éditions Philippe DUVAL, mai 2014

retour aux articles