La tétine

La tétine et l'enfant

Sujet de débats, de polémique, souvent la tétine fait beaucoup parler d’elle, du coté des parents, comme des professionnels. Chacun a son avis sur la question…. Doit-on donner la tétine à l’enfant ? À quel moment ? Comment lui retirer la tétine ? Est-elle nécessaire ? Etc. Autant de questions que l’on se pose souvent.

La tétine c’est quoi ? C’est ce petit objet miracle qui apaise bébé, le réconforte, l’aide à s’endormir… Objet « magique » donc, mais alors, pourquoi veut on la lui retirer ? Comment devient-elle un objet de dépendance ?

LA TÉTINE : OBJET D’ADDICTION ?

La tétine est introduite dans la bouche par l’adulte, dès tout petit, pour le calmer, l’apaiser, l’empêcher de pleurer. C’est donc l’adulte, au départ, qui fournit à l’enfant un moyen d’apaisement, et non l’enfant qui trouve ce moyen seul. La tétine, souvent, devient une solution pour arrêter les pleurs, difficiles à supporter. Il est vrai que le bébé a besoin de sucer. La succion correspond à un besoin physiologique : téter lui apporte plaisir et détente grâce à l’endomorphine, appelée aussi « hormone du bien être », secrétée par la succion. La succion a donc un rôle apaisant et calmant. Si la tétine rempli ce rôle de succion, ce n’est pas elle qui apaise l’enfant. Elle ne remplace en effet pas les bras, les câlins, les paroles douces de l’adulte. Par ailleurs, l’enfant, pour répondre à son besoin de succion, peut trouver de lui-même son pouce ou ses doigts lorsque la tétine ne lui est pas proposée d’emblée, ce qui lui permet de « gérer » la réponse à son besoin de succion de lui-même, sans attendre de l’adulte qu’il lui mette la tétine à la bouche. Elle peut devenir alors un objet d’addiction qui devient bien difficile à gérer une fois que le bébé grandit : il pleure dans la nuit car il a perdu sa tétine, la perte de cet objet devient un « drame »…

Elle peut devenir un « tais-toi » pour faire taire l’enfant ou le stopper dans ses pleurs, si l’on extrapole un peu… et du coup, cet objet dans la bouche de l’enfant risque de couper toute communication. Elle crée parfois des tensions entre professionnels et parents car il faut « gérer » la tétine : à quel moment il faut la donner ? Juste pour à sieste ? Ah mais s’il pleure, est ce qu’on lui donne ? Vous souhaitez la lui retirer du jour au lendemain ? Etc…

Alors, la tétine, « bon » ou « mauvais » objet ?

DU BON USAGE DE LA TÉTINE…

Si l’enfant est allaité dès la naissance, peut-être n’est-il pas nécessaire de lui donner de suite la tétine. Elle peut servir en effet au besoin de succion qu’à tout nourrisson, mais pas comme moyen de combler les pleurs. Il est même parfois préconisé par certains spécialistes de donner son petit doigt à l’enfant afin qu’il trouve ensuite de lui-même son pouce ou ses doigts. Si cela ne suffit pas, il est toujours temps de proposer la tétine ensuite. Alors, pas de panique, il n’est pas nécessaire d’avoir la tétine dès la naissance.

Le risque de cette tétine donnée trop vite, si vite lorsque l’enfant pleure, est qu’elle enferme l’enfant et l’empêche d’interagir avec son entourage. Avant de proposer la tétine, il est donc important de parler à l’enfant, d’essayer de savoir ce qui ne va pas, pourquoi il pleure. Plus on met des mots, de l’échange, plus on est en mesure d’instaurer un dialogue avec l’enfant. Mieux vaut également qu’il ne parle pas avec sa tétine à la bouche, afin de ne pas déformer la prononciation. On peut aussi lui dire que l’on ne comprend pas ce qu’il dit, afin de l’amener de lui-même à retirer la tétine lorsqu’il parle.

Elle peut également être investie par l’enfant comme objet transitionnel, au même titre qu’un doudou. Objet qui lui permet de se réassurer en cas de besoin dans les moments difficiles. Il peut alors être intéressant de mettre une « boite à tétine » à la maison, ou un espace qui lui est dédié, afin que l’enfant puisse la poser et la ranger lui-même, et la reprendre de lui-même quand il en a besoin. C’est ce que nous proposons à la Micro-crèche avec « la maison des doudous et tétines », petit meuble avec des casiers ; Chaque enfant a « sa case », dans laquelle il peut déposer son doudou et / ou sa tétine, et les reprendre à tout moment. Cela permet de responsabiliser l’enfant, de lui faire confiance, et de l’inciter à se détacher lui-même de son doudou et sa tétine.

Il peut arriver qu’un jour la tétine soit oubliée, ou alors perdue… cela peut représenter une difficulté pour l’enfant, mais qui n’est pas insurmontable ! Parents ou même professionnels, nous avons tendance à paniquer, et se dire que cela va être trop difficile pour lui. Or, la panique des adultes ne fait qu’augmenter l’angoisse liée à ce manque de tétine. A croire que nous sommes tout aussi accrocs à cet objet, et qu’elle est à nos yeux indispensables !

Il s’agit, lorsque cette situation arrive, d’avoir confiance en l’enfant en lui expliquant qu’il devra faire sans tétine aujourd’hui, mais que nous savons qu’il va très bien s’en sortir sans. Si nous avons des « tétines de secours », nous pouvons lui en proposer. Pas de panique, alors, si un jour, l’enfant n’a pas sa tétine. Les paroles, les bras, les câlins, les jeux, permettraient de combler ce « manque ».

LE « SEVRAGE »

À 5 ou 6 mois, le bébé se détache de lui-même pour s’intéresser au monde extérieur : « C’est le bon moment pour proposer d’autres moyens de l’amener à se consoler », conseille Armand Malka, pédiatre à Paris et coauteur de “L’Art de nourrir les bébés”, sous la direction de Myriam Szejer (Albin Michel, 2008). Il peut ainsi être opportun à ce moment là, d’essayer de la mettre de côté.

Lorsque l’enfant est plus grand, vouloir supprimer la tétine alors qu’elle est investie par l’enfant comme un doudou peut s’avérer très dur pour lui. Ça serait comme lui ôter son doudou du jour au lendemain, alors qu’il l’investit pour se rassurer, réconforter, lors de moments difficiles et de fatigue. En l’accompagnant lui proposant de déposer, lui-même, en lui demandant de l’enlever pour parler, l’enfant va gérer de lui-même sa tétine et peu à peu s’en détacher. A condition qu’elle ne soit pas utilisée par l’adulte systématiquement dès qu’il pleure ! Car là c’est l’adulte qui gère et non plus l’enfant.

On en revient à l’essentiel : amener l’enfant à lâcher son « bouchon », c’est pour ses parents et les professionnels s’occuper davantage de lui, le solliciter, lui parler pour l’aider à parler avec les autres. C’est trouver d’autres moyens pour le consoler, pour le rassurer, le réconforter…

On peut alors dire que la tétine n’est pas indispensable à la naissance. L’enfant qui suce son pouce est peut être une « meilleure solution » que la tétine, car cela ne le rend pas dépendant de l’adulte, et il peut s’en passer une fois son besoin de succion terminé ! La manière dont la tétine est proposée par l’adulte va inciter la manière dont l’enfant va l’investir… une tétine proposée pour la succion, pour les moments difficiles (accompagné de paroles – même utilité ici que le doudou), peut être intéressant, et l’enfant peut s’en détacher de lui-même, en l’accompagnant et le responsabilisant. Au contraire, une tétine utilisée PAR L’ADULTE systématiquement lorsqu’il y a des pleurs, pour faire « taire » l’enfant ou lorsque l’enfant « mord » beaucoup (ce que nous appelons la « tétine bouchon ») peut rendre l’enfant dépendant de cet objet, et il aura bien du mal à s’en passer et à s’en détacher…

Quoiqu’il en soit, la tétine n’est pas « mauvaise » en soi, et, ne vous inquiétez pas, l’enfant finira par l’abandonner, par un travail d’accompagnement bienveillant et de confiance en l’enfant… Rappelons-nous que c’est nous, adultes qui avons créée ce besoin de la tétine ! Laissez du temps à l’enfant pour s’en défaire… soyons patients et tolérants, sans nous, il ne serait pas devenu « accroc » !

Aurélie, éducatrice de jeunes enfants

BIBLIOGRAPHIE
“L’ABéBéC de la Petite Enfance”, Laurence RAMEAU, éditions Phillippe DUVAL, mai 2014
http://www.aufeminin.com/bebe/tetine-bebe-avantages-inconvenients-s647517.html
http://www.psychologies.com/Famille/Enfants/Apprentissage/Articles-et-Dossiers/Tetine-et-tais-toi

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