L’éducation positive

L’éducation : un sujet de débats et de remises en question

L’éducation fait parler d’elle, et les controverses sont nombreuses quant à la manière d’éduquer. Le 22 décembre 2016, l’Assemblée Nationale a voté l’article 68 du projet de loi « Égalité et Citoyenneté », permettant de modifier l’article 371-1 du Code civil. Cet article précisait que l’exercice de l’autorité parentale exclut « tout traitement cruel, dégradant ou humiliant, y compris tout recours aux violences corporelles. » Sous-entendu que les fessées, notamment, devenaient interdites. Il est intéressant de savoir que déjà 21 pays de l’Union Européenne ont interdit les châtiments corporels et les violences éducatives. Cet article en France a pourtant été invalidé par le Conseil Constitutionnel peu de temps après. Ce retournement de situation questionne, mais là n’est pas le débat. Il est surtout question de réfléchir ici aux modèles éducatifs actuels, et à des alternatives. Pourquoi remet-on en question ces fameuses punitions, les fessées, l’autorité par les cris….. ?
Tout simplement parce que les connaissances sur le jeune enfant évoluent, et nous démontrent les méfaits d’une éducation par ces méthodes. Ce sont les recherches scientifiques sur le cerveau de l’enfant qui font des découvertes remettant en question ces modèles que nous avons tous plus ou moins vécus, subits, étant enfants. Ces études sont reprises par des auteurs (psychologues, pédagogues) qui retraduisent le langage scientifique et proposent d’autres façons de voir les choses et d’éduquer, qui seraient bien plus appropriés pour le jeune enfant. C’est ce qu’on appelle les nouvelles recherches en neurosciences, sur lesquelles les professionnels s’appuient désormais. Encore peu connues, ces études se développent peu à peu. Néanmoins il faut souvent aller chercher les informations, et les familles n’ont pas toujours le temps, ou alors restent persuadées que les punitions sont efficaces, et que chacun a sa propre manière d’éduquer. Parfois la théorie est bien comprise, mais on se demande : comment peut-on faire autrement ?
Il ne s’agit pas de juger les pratiques éducatives, mais simplement de pouvoir les remettre en question, s’ouvrir à d’autres modèles d’éducation, et les essayer… Certains pensent qu’il est nécessaire de crier pour affirmer son autorité, ou de punir. Ce qu’il faut savoir c’est que l’éducation donnée à l’enfant a des impacts sur l’adulte qu’il sera. Il y a des choses, comportements, qui s’inscrivent en lui et qui jouent sur sa confiance en lui et les autres, son estime de lui-même, ses relations avec les autres. Notre mission d’éducation n’est-elle pas d’amener l’enfant vers un bien-être physique, psychologique, et vers le bonheur tout simplement ? D’en faire des êtres autonomes, ayant confiance en eux, étant sereins pour l’avenir, entreprenants, qui réussissent dans leur vie professionnelle et familiale…etc. ? Bref, nous voulons tous le meilleur pour les enfants, que nous soyons parents, éducateurs, adultes ! Nous allons alors tenter de proposer une méthode basée sur « la parentalité positive » ou « éducation positive ».

Questionnements autour de l’éducation par la « peur »

L’éducation par la peur, les cris, les fessées n’est pas la meilleure solution, et en plus de cela, elle est inefficace sur le long terme. Sur le moment, elle peut être efficace, par crainte de l’enfant de votre réaction, par la peur que vous lui inspirez. L’enfant a peur, il se plie à votre demande. Mais alors nous pouvons nous questionner : la peur, est-ce une méthode éducative constructive ? Cela permet-il de faire comprendre à votre enfant ce qu’il a fait de mal ? Cela lui permet-il de réfléchir et surtout intégrer le « mauvais comportement », afin de ne pas le reproduire ? Sait-il pourquoi vous vous énervez ainsi ? A-t-il compris quelque chose ? Était-il vraiment en train de vous provoquer ? Ou peut-être est-il juste fatigué et agit par « les nerfs » ? Peut-être a t-il juste besoin d’attirer votre attention parce que vous êtes occupé depuis un moment à faire autre chose, et qu’il joue tout seul depuis un long moment ? Peut-être a t-il juste besoin d’un câlin et il n’arrive pas à le dire ou à l’exprimer ? Parce qu’il a remarqué que, quand il fait des bêtises, vous avez toute votre attention sur LUI et cela peut durer un moment, s’il pousse un peu le bouchon et continue. Avec du recul, nous pouvons réfléchir à tout ça et ainsi mieux appréhender ses comportements.
Allons un peu plus loin en faisant un petit zoom sur les punitions et les fessées, car ce sont les deux grandes méthodes les plus utilisées pour éduquer… en nous posant la question : pourquoi ce n’est pas efficace ? Je me suis appuyée sur le livre d’Isabelle Filliozat « j’ai tout essayé… » afin de parler des punitions et des fessées. Ces dernières étant considérées comme des « violences éducatives ordinaires » (VEO).

Les punitions

Comme le souligne Isabelle Filliozat : « Si les punitions éduquaient, il y a belle lurette que l’espèce humaine ne commettrait plus de crimes ». L’illusion des bienfaits des punitions provient du fait qu’elles ont une efficacité sur le court terme. Cette efficacité ne dure jamais bien longtemps, mais la punition permet le soulagement du punisseur, qui a ainsi le sentiment de reprendre le contrôle de la situation.
En plus de cela, les punitions ne règlent pas la situation, le problème qui a généré cette sanction. Le risque ? Que la situation se reproduise, que les punitions soient répétitives, et qu’elles n’aient plus aucun effet. Le parent perd de l’autorité progressivement : d’une part parce que l’enfant se protège de ses sentiments désagréables par un « je m’en fiche » et d’autre part parce que, du fait de leur inefficacité sur le moyen et long terme, les punitions risquent d’être de plus en plus sévères.
Souvent, la punition n’est pas en lien avec le comportement qui l’a déclenchée. Aller au coin : que cela signifie-t-il pour l’enfant ? Est-ce une réponse au fait qu’il vient de déchirer un livre par exemple ? Du coup, l’enfant n’apprend rien sur le « pourquoi » ce qu’il a fait n’était pas approprié, était interdit. Cela ne permet pas non plus à l’enfant de faire face aux conséquences naturelles ou logiques de ses actes et de les réparer.
Par ailleurs, la punition détourne l’attention de l’enfant vers des sentiments négatifs à l’égard du parent, et elle empêche l’émergence du sentiment sain de culpabilité de l’enfant. Pris dans sa punition, dans sa colère / crainte etc., le comportement « déclencheur » a déjà été oublié. En effet, les émotions qui découlent de la punition stimulent le circuit de stress et empêchent l’enfant de réfléchir à ce qu’il a fait. La mémoire fonctionne, oui, mais l’enfant mémorisera le stress, la peur du parent, et non pas ce qui aura déclenché la punition. Les punitions n’enseignent que la peur du gendarme et non pas responsabilité et autodiscipline.
La punition fait également souvent honte à l’enfant, qui a le sentiment d’être mauvais en tant que personne. La peur et cette honte inhibent les fonctions cérébrales supérieures, ce qui a un impact sur les performances intellectuelles, la vie émotionnelle et la socialisation.
Ce qu’il est intéressant de savoir, c’est que punir n’est pas manifester son autorité. Nous punissons au contraire par manque d’autorité ! Le parent exerce une autorité naturelle. Si celle-ci est reconnue, nul besoin de se montrer autoritaire. Les parents punissent souvent parce qu’ils sont dépassés et impuissants. L’enfant le perçoit et perd confiance en ses parents, cela l’insécurise, et cette insécurité se manifestera par davantage de comportements déviants.
Pendant des siècles, on a forcé les enfants à se soumettre par la crainte. On sait aujourd’hui que l’activation répétée de l’alerte cérébrale déclenchée par la peur durant l’enfance peut provoquer plus tard des troubles de l’anxiété.

COUPS, GIFLES, FESSÉES

Frapper, gifler, donner des fessées, tirer les oreilles, donner des petites tapes,… Fait du bien au parent qui s’est libéré de ses tensions et a l’impression de faire quelque chose, donc de ne plus être impuissant. Pour le reste c’est non seulement inutile, mais nocif. Tout d‘abord, les coups enseignent que frapper est une manière de résoudre les problèmes. Et s’ils interrompent le comportement sur le court terme, ils sont inefficaces sur le moyen comme sur le long terme. Pour cette raison, si le parent persiste dans cette voie, il risque d’escalader dans la violence. L’enfant, pour se protéger, se blinde par un « même pas mal ». Cette insensibilisation lui posera problème plus tard.
Les coups figent le développement émotionnel naturel. L’enfant se sent humilié, honteux, il est diminué, coupable de tout, mauvais, ce qui altère sa confiance en lui-même et en ses capacités. Il éprouve des sentiments d’abandon, d’exclusion, de rejet, il se considère sans valeur. Il accumule en lui de la peur et de la rage qui risquent de ressortir plus tard en symptômes de violence sur autrui, les copains à l’école, puis toute personne sur qui il aura de l’ascendant (ses enfants notamment) ou retournée contre lui-même ( sous forme de maladie psychosomatique ou d’échecs répétés).
Même adulte, la crainte sera prête à resurgir à chaque instant. Ayant peu confiance en lui, il tentera de s’adapter plutôt que de remettre en cause les choses, se soumettra avec obéissance à toute autorité ou au contraire prendra le pouvoir par la force sur autrui, puisque c’est ce qu’il aura appris. L’autre est vécu comme potentiellement dangereux : l’enfant, puis l’adulte s’éloigne des autres physiquement et/ou affectivement. Les coups introduisent une confusion dans les repères. Comment comprendre que ceux qui disent vous aimer frappent ? Dans la tête de l’enfant, amour et humiliation s’associent, ce qui ne présage rien de bon pour ses futures relations amoureuses.
Ces méthodes éducatives « classiques », sont issues de comportements instinctifs et réflexes. Nous avons toujours « fait comme ça » : Les générations précédentes, nos générations, ont reçu des fessées, ont connu les punitions (être « privé de dessert », aller « au coin », être enfermé dans sa chambre seul pour « se calmer »…). Tout le monde s’en souvient. Certains adultes ont des souvenirs précis de situations qu’ils ont vécues, il reste parfois un goût amer de certaines fessées, ou de menaces. Autant dire que cela nous a marqué, que ces principes sont tenaces, puisque cela reste dans nos mémoires. Pourtant la majorité des personnes s’en sortent bien dans la vie, et c’est pourquoi, revient toujours ce discours « je n’en suis pas mort », « une bonne fessée, ça ne peut pas faire de mal », « il faut bien crier pour se faire entendre », etc. Ce sont des phrases que nous entendons souvent. Facile de remettre en question tout cela me direz-vous… mais comment faire autrement ?

Qu’est-ce que l’éducation « positive »

Le courant d’éducation positive vient des États-Unis avec Thomas Gordon et Aletha Solter, depuis les années 1980. En France, c’est seulement depuis les années 1990 que certains auteurs tâchent de faire connaître l’éducation positive : ses principes et ses bienfaits. Nous pouvons citer Isabelle Filliozat, Catherine Gueguen, et j’en passe. Leurs lectures sont accessibles, et donc recommandées pour les professionnels mais aussi les familles ! Sur internet, de nombreux articles, vidéos véhiculent ces idées.
Il s’agit d’un modèle d’éducation différent que l’autorité par la peur ou le conditionnement. Il amène une autre façon de voir les choses. Ce modèle éducatif permet de mieux comprendre ce qui se passe pour l’enfant et ainsi de considérer et de prendre en charge les « colères », les « caprices » de l’enfant, ses comportements « provocateurs », sa « désobéissance », d’une manière plus empathique et positive.
Il ne s’agit pas d’être dans un « laisser faire », ni d’être dans une position de soumission à son enfant. Oui, il est possible d’éduquer et de poser des limites sans crier, sans punir ! J’insiste sur le fait qu’il ne s’agit pas d’une éducation « permissive », mais plus compréhensive de l’enfant, de ses capacités. Il s’agit de partir de l’enfant, ce qu’il peut vivre, ressentir.
Les neurosciences nous informent sur la maturité du cerveau de l’enfant, ce qu’il peut comprendre de son environnement, à quel âge… etc. Elles permettent de comprendre que NON l’enfant ne fait pas des caprices, l’enfant ne provoque pas, il ne manipule pas. Mais il réagit, avec ce qu’il ressent, ce qu’il comprend de la situation, les moyens qu’il a sa disposition pour comprendre son environnement, les réactions des autres. Il agit en fonction de ses modèles (vous, les parents, et nous les professionnels), de ce qui lui est montré par l’adulte : un adulte qui « tape » un enfant = un enfant qui comprend que l’on résout les problèmes en tapant. L’enfant reproduit ce que l’on dit, fait, il nous imite et c’est par ce qu’il voit de nous, adultes, qu’il apprend à gérer ses émotions et des situations qui se présentent à lui. L’enfant a tout à découvrir, et nous sommes là en tant qu’adultes pour les guider.

Concrètement, comment faire ?

L’éducation positive consiste surtout à être dans une meilleure compréhension de l’enfant, à être dans une observation plus attentive de ses besoins, et à réagir de manière positive, sans cris, sans punitions. C’est une méthode qui a des résultats et une efficacité sur le long terme. L’inconvénient est que cela demande beaucoup d’attention, d’observation et de patience (pas toujours facile en étant parent !)
Dans l’approche positive, il s’agit :
• D’identifier le besoin
« Derrière une réaction inappropriée se cache un besoin », répète Isabelle Filliozat dans ses écrits et ses conférences. « Nos interprétations guident notre comportement. Il est donc fondamental de mieux comprendre les motivations des enfants ». L’idée est que le comportement de l’enfant a souvent une signification plus profonde que ce qu’il ne laisse penser. Elle explique également que les attentes des adultes ne sont pas toujours adaptées à la maturité de l’enfant. Souvent, une bêtise est une façon d’attirer l’attention. La réponse consiste donc, non pas à punir, mais à consacrer davantage de temps à l’enfant. Raisonner en termes de “besoins” change totalement la manière de répondre et d’éduquer. Pour essayer de comprendre ce qui se joue réellement, il est important de bien observer l’enfant, émettre des hypothèses sur ce qui a pu le pousser à faire telle ou telle chose, et de le questionner pour décrypter au mieux ce qui a motivé sa « bêtise » par exemple. Cela permet de répondre à son besoin réel, et de lui expliquer comment il est possible de l’exprimer autrement.
• D’accueillir les émotions
L’écoute sans jugement et l’acceptation sont nécessaires pour aider l’enfant à comprendre ses émotions et à ne pas en avoir peur. Lorsqu’un enfant pleure, est en colère, frustré, nous avons tendance à lui changer les idées, à le faire « taire ». Car les pleurs sont dérangeants, les cris sont parfois difficiles à entendre… Or, un enfant a besoin d’exprimer ses émotions négatives, de les sortir. Il s’agit alors de ne pas chercher à arrêter des manifestations de colère, de tristesse ou de frustration mais de les accompagner en prenant par exemple l’enfant dans ses bras et en mettant des mots sur les émotions qu’il vit. Il est possible également de lui montrer comment il est « acceptable » d’exprimer sa colère. Par exemple, à la micro-crèche, nous pouvons accompagner de cette manière : «je vois que tu es très en colère parce que… je comprends que… mais il est interdit de taper d’autres enfants ou de jeter des jeux. Si tu as besoin d’évacuer ta colère, tu peux taper sur un coussin, là tu as le droit. Et si tu as besoin pour te calmer, je suis là et disponible pour te prendre dans les bras ». Une fois la « tempête émotionnelle » passée, il est intéressant de revenir sur ce qui s’est passé. Une fois calme, l’enfant est capable d’écouter (ce qu’il n’est pas capable de faire pris dans sa colère).
• De privilégier les solutions aux punitions
Le quotidien des familles est marqué par les ordres et les punitions. Il serait bien plus intéressant et constructif pour l’enfant de remplacer les punitions par la « recherche de solution ». Il s’agit d’inviter les enfants à trouver des solutions, cela libère leur créativité et les responsabilise. Lorsqu’ils sont trop petits, nous leur proposons une solution et leur montrons comment faire. Par exemple, un enfant qui renverse son verre d’eau. Pour l’enfant cela peut tout simplement être une expérience (renverser, vider), ou une maladresse (le verre lui a échappé des mains). Plutôt que de le gronder, il est possible de lui demander : « tu as voulu faire une expérience ? Mais ce n’est pas le moment. Le verre d’eau à table est fait pour boire. Tu pourras faire des expériences après le repas. Nous pourrons jouer avec de l’eau si tu le souhaites ». Il s’agit de lui expliquer que le verre d’eau n’est pas fait pour jouer, et lui montrer comment réparer, en lui proposant d’essuyer l’eau avec un chiffon. En les accompagnant dans cette démarche, l’enfant intègre davantage de « meilleurs comportements », et nous lui donnons les outils pour faire face à certaines situations. Cette approche est résolument tournée vers l’avenir, contrairement à la notion de « faire payer », typique de la punition, tournée vers le passé (la faute commise). Elle aide l’enfant au lieu de le blesser.

EXEMPLES DE SITUATIONS CONCRÈTES

Situation 1 : à la micro-crèche

Un enfant de 22 mois, Édouard, est en train de jouer à la dinette. Il est sur une chaise, face à la table. Il se lève, va chercher une petite assiette sur un meuble à côté. Un autre enfant, Adeline, vient s’asseoir pendant ce temps sur cette même chaise (sur laquelle Édouard était assis). Édouard retourne vers sa chaise et pousse Adeline.
Dans cette situation, nous serions tentés de punir Édouard, qui a poussé Adeline ! Mais si nous regardons la scène de plus près, Adeline, a « pris » la « place » d’Édouard qui s’était levé juste pour aller chercher quelque chose. Lorsqu’il revient et voit sa place prise, sa réaction est de vouloir reprendre sa place. Comment ? En poussant l’enfant qui se trouve sur sa chaise.
L’enfant en dessous de trois ans est encore dans une toute puissance et dans « tout est à moi ». Pour Édouard, c’était SA place ! Adeline, quant à elle a vu une place de libre et l’a prise, voulant jouer avec ce qui se trouvait sur la table. Qui a tort ? Qui a raison ? La régulation des conflits est délicate, mais en connaissant bien le développement de l’enfant, ce qu’il est capable de comprendre, nous pouvons accompagner cette situation de manière bienveillante, tout en rappelant les règles.
Comment agissons nous ?
Ici, nous consolons Adeline qui vient d’être poussée. Nous lui expliquons qu’Édouard était en train de jouer ici et qu’il n’était pas content de voir quelqu’un sur la chaise sur laquelle il était assis. Nous lui disons qu’Édouard n’a pas le droit de pousser, et que nous allons le lui dire. Nous pouvons également proposer à Adeline une autre chaise pour qu’elle puisse s’installer à coté et jouer à la dinette.
Puis nous reprenons la situation avec Édouard calmement. Nous pouvons lui demander : pourquoi as-tu poussé Adeline ? Parce qu’elle était sur la chaise que tu occupais ? Nous pouvons lui expliquer que, oui il n’était pas content qu’Adeline soit sur sa chaise. Oui il a le droit d’être en colère et de l’exprimer. MAIS qu’il n’a pas le droit de pousser. Par contre il a le droit de lui dire qu’il était en train de jouer ici et qu’il aimerait retrouver sa chaise. (Nous formulons des choses qu’il n’est pas en capacité de dire pour le moment, mais le fait de l’entendre, il pourra s’en servir plus tard lorsqu’il aura bien acquis le langage). Ou bien qu’il peut venir chercher un adulte pour réguler tout ça.
Les enfants n’ont pas encore les mots pour dire les choses. Ils agissent donc pour se faire comprendre, mais ici il n’y avait pas intention de faire mal. Il voulait juste récupérer « sa » place. En étant dans la compréhension de la maturité de l’enfant et de ce qu’il est capable de faire et comprendre, nous avons alors une démarche différente. Par instinct, réflexe, la tendance aurait été de s’énerver contre Édouard, crier pour se faire entendre et lui dire que c’est interdit de pousser ! En prenant du recul, la démarche est toute autre.

Situation 2 : qui pourrait se produire à la maison

Vous êtes avec votre enfant d’un an à table. Vous lui donnez à manger avec la cuillère. L’enfant met les mains dans sa purée. Puis se touche le visage. Il s’en met sur les cheveux. Situation souvent rencontrée. Dans beaucoup de cas, le parent s’énerve, il lui dit d’arrêter. L’enfant recommence, tourne la tête lorsque vous essayez de lui donner à manger. Il remet les mains dans la purée. Le parent s’énerve de plus belle et crie « arrête de jouer avec la nourriture ! ». En plus, l’enfant refuse de manger, ce qui stresse le parent. Le parent finit par enlever de table l’enfant en lui disant « bon si tu ne veux pas manger, on s’arrête la ».
Alors, que voyons-nous dans cette situation ?
L’enfant met les mains dans la nourriture : cela dérange. Mais ce qu’il faut savoir c’est que l’enfant vers un an, voire même un peu plus tôt, commence à vouloir toucher ce qu’il y a dans son assiette. L’enfant est curieux de nature, il a besoin de toucher, sentir, goûter, afin de connaître les choses, les objets, les aliments… ainsi, cette purée l’intrigue. Il utilise ses mains pour découvrir la texture.
Peut-être aussi, est-ce un moyen pour lui d’exprimer son désir d’autonomie et de vouloir manger tout seul ? Peut-être a t’il envie de prendre une part active lors de son repas. Car là c’est le parent qui donne à manger à l’enfant en lui tendant la cuillère à la bouche. Mais si l’enfant a envie d’essayer tout seul ? Il n’a là que ses mains pour essayer.
Plutôt que de s’énerve, peut-être qu’on pourrait lui demander : « tu mets les mains dans la purée, tu as envie de manger tout seul ? ». Ou « tu as envie de toucher la purée ? Ça t’intrigue ? ». Et là il est possible de parler de ce qu’il y a dans son assiette : « tu vois ce soir c’est de la purée de carottes, il y a des petits morceaux dedans. Tu as vu elle est orange cette purée. Est-ce que ça te plait ? » Etc. Favoriser l’échange autour de ce qu’il mange peut assouvir son besoin de découvertes. Il y mettra les mains, ça c’est inévitable, mais c’est parce qu’il en a BESOIN. Il ne fait pas ça pour vous embêter !
S’il manifeste son désir d’autonomie, n’hésitez pas à lui donner la cuillère pour qu’il la manipule et essaye de lui-même. À la micro-crèche, nous avons toujours deux cuillères : une pour l’enfant, et une pour l’adulte qui lui tend à manger. Ainsi, l’enfant peut s’essayer de lui-même à la cuillère.
Alors oui il y en aura partout, c’est inévitable les premières fois. L’enfant est dans la découverte, il essaye, il touche, etc. mais il est nécessaire d’organiser les conditions favorables pour que cela se passe bien ! (une nappe, un tablier pour l’enfant, des gants pour le débarbouiller par exemple).
Souvent l’agacement du parent provient du fait qu’il est peut être fatigué, notamment le soir, qu’il aimerait que le repas se déroule dans le calme (et le propre !) et que l’enfant mange tout ce qui lui est proposé ! C’est l’idéal. Mais rappelons-nous que nous sommes avec des enfants qui apprennent, grandissent, ont des besoins…. Il y a souvent un décalage entre l’attente DU PARENT et le besoin de l’enfant. C’est de ce décalage que naissent souvent les « conflits », et que l’on dit de l’enfant qu’il fait des « bêtises ». Or ce ne sont pas des bêtises, ce sont des expériences.
Un accompagnement bienveillant se manifeste par une observation et une écoute de ce que l’enfant nous montre, essaye de nous dire. Et tenter de répondre à sa demande / son besoin.

Pour conclure…

La parentalité positive est un sujet riche, qui demande à réfléchir, et à être approfondi. De nombreux ouvrages traitent de cette question, sur internet il est possible de trouver des « outils » concrets pour s’y mettre ! Cette approche permet de prendre du recul sur ce qui se joue pour l’enfant, sur ses besoins. Elle amène à une autre vision des comportements de l’enfant, et donc à un autre accompagnement. Avec l’éducation positive, il y a beaucoup plus de douceur, d’accompagnement, de compréhension et d’explication, de bienveillance. Cela demande beaucoup de patience de la part des parents (et aussi professionnels !), ce qui n’est pas toujours évident au quotidien. Mais l’efficacité est garantie sur le long terme, et l’ambiance familiale peut s’en trouver bien plus agréable pour tout le monde.
Des ouvrages pour aider les parents à mieux décrypter les comportements des enfants. Nous avons ces livres à disposition à la micro-crèche, il est possible de nous les emprunter !
• « J’ai tout essayé », Isabelle Filliozat, éditions poche marabout, janvier 2013
« Au cœur des émotions de l’enfant », Isabelle Filliozat, éditions poche marabout, janvier 2013
« Pour une enfance heureuse », Dr Catherine Gueguen, éditions POCKET, mars 2016
Sites internet / blogs
http://eduquer-differemment.com/education-positive/education-positive-qu-est-ce-que-c-est/
Site internet « cool parents make happy kids »

L’équipe de la micro-crèche « Les Papillons »